Nous continuons la publication d’une grande série d’interviews de médiateur/rice numérique en bibliothèque ou hors bibliothèque.

Les enjeux de la démarche étaient de recueillir des données factuelles permettant de dégager de grandes tendances en termes de compétences et de types d’accompagnements des usages dans des contextes pluriels.

Avant de commencer, on se posait quelques questions comme : Y-a-t-il des différences dans la façon d’aborder l’inclusion numérique en et hors bibliothèque ? Des lignes claires se dégagent-elles dans le positionnement professionnel ? Les différents médiateurs numériques connaissent-ils leurs champs d’intervention réciproques quand ils n’évoluent pas dans le même contexte?

L’enquête nous apporte des réponses que l’on vous livrera d’ici quelques semaines.

Dans l’attente, on vous propose la publication d’une série de portraits.

Personne interviewée : Juliette CERNESSON

Poste occupé : Référent numérique

Etablissement : Réseau des Médiathèques de Talence

  1. Quel est votre parcours d’études ? 

Éclectique ! BTS de commerce, DEUG d’informatique avec une spécialité en gestion des bases de données, auto-formation pour les normes bibliothéconomiques (ISBD, Rameau, UNIMARC) en milieu professionnel.

  1. Quel est votre parcours professionnel ?

J’ai commencé par de la vente, du secrétariat puis une reprise d’études en travaillant dans des centres de documentation spécialisés (IFSI) qui m’a permis de rentrer dans le monde des bibliothèques à une époque où les formations biblio/info n’existait pas.

Cela a donné un profil peu commun (en ces temps reculés : 1995) qui m’a permis d’entrer dans la FPT en tant que cheffe de projet informatique. Après obtention du concours Assistante qualifiée, j’ai géré de nombreux projets en parallèle avec la médiation numérique vers le public et les agents de la collectivité. Bien sûr, l’administration des SIGB et des portails/bibliothèques numériques avec un webmaster et de nombreux contributeurs faisait partie du poste.

Puis dans une autre collectivité, je me suis lancée dans la gestion d’un secteur numérique avec des animatrices multimédia dans un réseau de Médiathèques et la mise en place de projets nombreux et variés mais toujours en lien avec le numérique : prêt numérique en bibliothèque, réinformatisation, changement de portail, changement de logiciel de gestion des EPN et d’autres à venir.

L’administration des SIGB et portail est comme la cerise sur le gâteau.

  1. Vous sentez-vous légitime aujourd’hui dans le domaine de la médnum ?

Absolument. Notre pôle Numérique est intégré à toutes les opérations de lutte contre la fracture numérique tant au niveau communal qu’au niveau de l’agglomération. C’est une forme de reconnaissance de nos ateliers et animations. Il faut dire que nous organisons énormément d’ateliers/rencontres/animations : plus de 120 par an, tout public confondu !

Et au vu de nos statistiques et retours des usagers, cela semble fonctionner correctement. Nous voyons nos apprenants (ceux qui viennent maitriser l’outil) pendant un temps jusqu’à ce qu’ils se débrouillent seuls et ne viennent plus que pour les conférences ou ateliers pour augmenter leur champ de savoir. Nous voyons les jeunes se jeter sur les jeux (en ligne ou en local, sur pc ou sur console) et puis évoluer lentement vers des usages plus rationnels et pratiques. Nous voyons les usagers se saluer et s’entraider parfois en toute simplicité.

Et c’est bien.

  1. Pour vous, quelles sont les missions d’un médiateur numérique ? Que mettez-vous dans votre périmètre, et que mettez-vous en dehors ? La question « de faire avec » versus « faire à la place de » se pose-t-elle fréquemment ?

Notre positionnement a clairement été de « faire avec » et non « à la place de ». Position grandement facilitée par la présence de points « France Connect » proches de nos médiathèques, de personnels labellisés « Aidant Connect » et de Conseillers Numériques au sein de la commune ! 

Pour expliquer de façon imagée notre périmètre, nous disons volontiers que nous sommes comme des moniteurs d’auto-école, pas des garagistes ni des taxis.

Nos missions exposées de façon non exhaustive regroupent l’aide à l’usage des matériels numériques, l’autoformation, la mise à disposition de matériels et de réseau internet, la médiation autour du numérique sous forme de conférence sur un thème précis, de temps d’échange conviviaux ou travaux pratiques. Pour vous donner quelques sujets abordés ces derniers mois :

  • Les cookies, à quoi ça sert ?
  • La e-réputation ou l’art de ne dévoiler que ce que l’on veut dévoiler
  • Les fake-news : escape game tout public
  • Voyage-voyage : chercher un billet de train ou d’avion sur le web
  • Menus de fête : réalisation avec Libreoffice Draw
  • Le point sur Les C.H.A.T.O.N.S, des hébergeurs de services en lignes libres et éthiques
  • Parents/enfants : Lan SupertuxKart, Venez affronter vos enfants dans une course endiablée !
  • Débat mouvant : Les réseaux sociaux : anges ou démons ? (dans les secteurs)
  • Réalisation de Masques en Réalité Augmenté (secteur jeunesse)
  • Paylib qu’est-ce que c’est, à quoi ça sert ?
  1. En tant que médiateur numérique, quelle est votre place dans votre équipe / service ? Quels liens sont tissés entre votre activité et celle de vos collègues ? Quelles compétences sont déjà partagées ? Quelles compétences mériteraient d’être davantage croisées ?

Bien que composée de médiatrices numériques, notre équipe a aussi en charge des fonds bibliographiques (informatique, fonds local et histoire), ce qui nous implique directement dans la vie bibliothéconomique de la médiathèque. Nous sommes capables de venir en renfort dans n’importe quel secteur/site du réseau des médiathèques. Et un nombre toujours plus important de collègues bibliothécaires est régulièrement en accueil et médiation dans les Espaces Numériques, tant sur des temps forts que dans le quotidien. Des animations mixtes se montent telles des heures du contes numériques, des ateliers de pixel art, des mises en page des créations d’atelier d’écriture, des présentations de parcours avec le FLE, etc…

L’objectif est de se mêler aux animations globales du réseau pour que le numérique ne soit plus une zone à part dans la médiathèque ni un blocage pour les usagers comme pour les professionnels.

  1. Selon vous, dans les années qui viennent, comment va évoluer la médnum et le métier de médiateur numérique en bibliothèque ?

On a encore beaucoup à faire pour que tout le monde soit capable de naviguer sur internet en toute sécurité, de manière raisonnable et rassurée ! Et l’évolution du matériel est tellement rapide que nous aurons toujours des usagers à renseigner.

  1. Quel type de public vient vous voir, et quel est son besoin, quelles sont ses demandes ?

De 11 ans à 92 ans, les demandes sont différentes, forcément. 

On peut classer un peu les joueurs (plutôt plus jeunes mais certains ne le sont plus vraiment !) qui ont besoin de matériel / logiciel / appli et de connexion mais aussi de nouvelles envies (à nous de les convaincre de tester tel ou tel jeu plutôt que se cantonner à Minecraft et FIFA).

Il y a aussi ceux qui sont là pour apprendre à se servir du matériel, des logiciels ou à faire un CV ou une langue étrangère : eux sont entre 20 et 89 ans.

Et puis ceux qui viennent avec un problème et ou un matériel récalcitrant. On sort alors nos outils didactiques pour leur faire trouver la solution et les rendre autonomes. Et là, pas de classe d’âge, car tout le monde peut être concerné.

  1. Sur quels matériels et logiciels intervenez-vous (ceux du public, ceux de la bibliothèque, les vôtres) ?

Il y a un peu des 3… Quand les gens sont coincés avec leurs logiciels, on regarde ce que l’on peut faire pour démêler l’affaire. Nous avons à disposition un catalogue intéressant de logiciels proposés par notre service informatique. Et parfois, nous demandons la mise en place de logiciels qui nous sont propres pour des ateliers spécifiques ou pour réaliser des travaux avec des logiciels que nous maitrisons.

  1. Avez-vous les moyens de faire votre travail de médiateur (matériels adaptés, réseau Wi-Fi accessible, accès possible aux sites les plus fréquents, etc.) ?

Par chance, nous profitons d’un réseau filaire stable et d’un wifi public correct. Bien sûr, il est toujours un peu compliqué de faire installer des logiciels ou des systèmes d’exploitation qui ne sont pas dans les catalogues de notre service informatique mais je trouve vraiment que nous avons les moyens de faire notre travail !

  1. Quel est votre rayon d’action géographique ?

Le rayon est assez restreint car nous sommes proches d’une grosse agglomération qui absorbe beaucoup d’usagers potentiels. Nous avons donc principalement (plus de 80%) des usagers de notre commune ou des communes directement adjacentes.

  1. Intervenez-vous dans des actions de médiation autres que numériques ?

Oui. Médiation autour du livre ou des bâtiments. Quel que soit le public.

  1. Si vous avez été médiateur numérique en dehors des bibliothèques : quelles sont les différences ?

Non toujours en bibliothèque.

  1. Avant d’y travailler, fréquentiez-vous des bibliothèques ?
  2. Si oui, pour quels services ?

Les livres et les CD (à l’époque, c’était le comble de la modernité).